Elle n’a pas ce qu’on appelle « la beauté classique ». Pas ce teint de porcelaine, pas ces gestes gracieux qu’on voit dans les films romantiques, pas cette présence qui attire les regards dès qu’elle entre dans une pièce. Elle est plus discrète, plus effacée, presque invisible pour certains. Et le pire, c’est qu’elle en est consciente. Elle le sait qu’elle est bien laide. Et parfois, ça transparaît dans sa manière de baisser les yeux, dans ses silences un peu trop longs, dans sa façon de se faire petite comme si elle ne voulait pas déranger ou se faire remarquer.
Mais ce qu’elle n’a pas en apparence, elle le déborde ailleurs. Une chaleur humaine désarmante. Une intelligence vive, presque crue, qui vous scanne et vous comprend avant même que vous n’ayez ouvert la bouche. Une capacité de travail qui ferait pâlir un PDG accro à l’efficacité. Elle est de ces femmes qu’on n’oublie pas une fois qu’on a appris à la connaître. Elle est douce sans être naïve, généreuse sans attendre en retour, et surtout, elle est vraie, honnête et travailleuse. Dans un monde de filtres et d’artifices, elle est cette bouffée d’air brut et sincère.
Nous avons été des amis pendant des années avant que quoi que ce soit ne se passe entre nous. Elle était cette amie sur qui je pouvais toujours compter, avec qui je pouvais parler de tout sans filtre. Et puis, un jour, sans prévenir, quelque chose a changé. Pas de feu d’artifice, pas de grand moment hollywoodien. Juste un frisson, un regard un peu trop long, une main effleurée et une certitude silencieuse : c’était elle. On a glissé de l’amitié à l’amour comme on glisse dans un pantalon confortable qu’on connaît déjà par cœur.
Et pourtant, même aujourd’hui, même après presque deux ans en couple, elle doute de moi, de nous, de mes sentiments. Elle n’a jamais eu de relation avant moi, jamais connu cette sensation-là, ce truc qui vous prend au ventre et vous rend vulnérable. Elle est entrée dans notre histoire avec une armure, forgée de solitude et de petites humiliations quotidiennes, et parfois, je sens encore cette petite froideur entre nous.
Un soir, elle m’a balancé ça : « Tu es avec moi parce que je suis facile d’accès. Bon marché. Tu peux facilement concasser sans souffrir ni mettre les organes. » J’ai cru que mon cœur allait se déchirer en deux. Pas parce que c’était injuste, même si ça l’était, mais parce que je voyais à quel point elle y croyait. Elle pensait sincèrement que je restais avec elle par commodité. Elle imaginait que tout ce que je voulais, c’était du sexe sans complications, pas une vraie relation. Et j’ai dû me battre, jour après jour, pour lui montrer que non, je ne cherchais pas une option simple. Je ne cherchais « qu’elle », avec ses doutes, ses failles, ses complexes.
Mais ce n’est pas le seul mata que je dois gérer. Mes potes n’arrêtent pas de me dire que je fais une erreur monumentale. Max, mon pote d’enfance, m’a sorti un jour : « Pense à la tronche de tes futurs gosses, mec. Ils t’en voudront si tu t’es contenté de moins alors que tu pouvais avoir mieux. Beaucoup mieux ! » Sérieux, il a vraiment dit ça. J’ai coupé les ponts avec lui, je pouvais pas accepter qu’il manque autant de respect à ma copine et à notre histoire.
Mais ce que je n’avais pas vu venir, c’est que mes parents pensaient pareil. Je leur ai présenté ma copine, tout s’est bien passé… jusqu’à ce que je parle de mariage. Là, c’était la douche froide. Ils se sont mis à rire, à me demander ce que je lui trouvais. Mon père a même appelé ma sœur devant moi pour lui raconter, et elle s’est moquée de moi au téléphone, en mode : « Dis-lui qu’on ne l’a pas élevé pour qu’il fasse ce genre de choix. » Franchement, ça m’a brisé. J’ai eu l’impression d’être un gamin incapable de prendre une décision sérieuse.
Le pire, c’est que ma copine attendait des nouvelles de cette visite. Elle voulait savoir comment ça s’était passé, et moi, j’étais incapable de lui dire la vérité. Du coup, j’ai esquivé, j’ai repoussé la prochaine rencontre avec les parents, j’ai inventé des excuses bidon. Mais elle n’est pas dupe. Elle sent quand un truc cloche. Et avec ses insécurités, elle supporte mal le flou ou les non-dits.
Là, je me retrouve à un carrefour. Est-ce que je lui dis la vérité, au risque de la blesser et de tout foutre en l’air ? Ou est-ce que je continue à mentir, sachant que ça ne tiendra pas longtemps ? C’est pas juste une question de couple, c’est aussi une question de famille. Comment tu fais pour ne pas perdre celle que tu aimes sans te mettre à dos les gens qui t’ont élevé ?